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poematique expiraTOIre

journal 154

le lit est une place où se donnent rendez-vous le sommeil et le désir comme deux faces d'un même masque. je plonge ou me noie. le sommeil est le plus fort de mes désirs. je dois le rejoindre comme l'unique issue à la dictature du travail. je réalise à quel point il est devenu le mouvement unique de mon existence et le travail celui qui va à l'envers de moi.

j'aimerais écrire dans le noir. entrer dans le noir intérieur. prendre d'assaut tranquille cette place avec ma plume. prendre vie. accéder à tout ce qui échappe ici au possible et prend là-bas consistance et mon corps noir.

et combien je répugne de sortir de la nuit avec  dans mes souvenirs une image pareille à celle de l'ordinaire. rêver de choses aussi semblables que celles vécues le jour et ressortir alors plus lasse de tout encore. c'est le cas ce matin où j'ai laissé dans le lit une massue laborieuse.

parfois cependant l'esprit se déshabille, le corps s'amollit et se rend frivole, visite des mondes aux battements de cils. décors parfaits de détails en détails. j'imagine alors le poème que j'écrirais, vivant dans cette autre existence une plume à la main

 

le pilulier de la nuit vient de cracher son sésame

limen des énigmes quand on traverse

les paupières closes

est-ce toujours dans ces choses fermées que se trouve la vraie clarté

passer la chair

passer le pont de sang qu'on ne franchit qu'en se coupant au fil de l'épée

passer d'un seul épuisement d'épaule

dans cette infinie faiblesse

la grande force qui ouvre le secret

et passer

avec sur les mots la robe du silence

 

ton nom je crois

  amour de profundis

énorme guerrier devant mon coeur et le noir.

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