journal 106

bourdonnement encore des notes. mes oreilles dégorgent.  la radio est éteinte mais oui,  j'entends que grésillent encore les trompettes et les cymbales de la première musique du jour. la puissance exagérée de cette symphonie, sur un instant à peine levé et qui s'impose au sein même du silence, m'a réclamé d'urgence ce geste:  j'ai tourné le bouton d'un agacement brusque, profondément dérangée par cette tempête métallique qui rendait ses timbres acides par mouvements de bataille.

sans doute une stratégie de vainqueur pour entreprendre la journée mais j'ai l'âme à perdre des choses et non à me monter un trône.  l'envie du violoncelle, du solo d'un piano, de quitter la nuit avec la douceur triste d'une amante contrainte.

sous cette houle de cuivres , ces "ciclées" de guerre, ces chevaux partout, c'est trop d'acide, trop de violence, de force, d'esprit conquérant. .

ce matin, je doute que dans mon coin de chambre, des Titans se soient dressés, ni des démiurges, les uns contre les autres pour gagner le grand terrain de leurs jeux. non, ce matin, dans cet espace, seul le solo d'une flûte ou les notes claires d'un Ravel auraient convenu pour dire que je m'apprêtais pour un peu de bonheur.