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poematique expiraTOIre

ultime recueil d'Alain Simon

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TRISTES GARÇONS, LA MER (titre du recueil)

 

 

 

 

Lenteur mais beaucoup trop machinale
Laissez-moi rire moi le briseur d’églises
le pilleur d’épaves (on le dira plus tard)

 

Trop pour qui décline facilement son identité
évidemment c’est un jeu suspect : ainsi je fus
au déroulement d’un paysage fait d’épuisantes gouttes
avec toujours plus de cris petits pépiements d’échos

 

Et sous la dent comme le même rappel de ce qui faisait ombre heureuse
déjà regain de mille terrasses possibles — entrevues utiles
avec faveurs accordées comme échos quand on est encore gniasse
quelque part dans le Sud près d’un fort carré
avec fossés et énigmes de suicide

 

Mais ces concerts qu’on déclarera confessions
sans jamais prononcer le mot seins même si l’obsession des tartines beurrées
et de la poudre de chocolat maintient en vie
on sait que ça freine sur le ciment avec tout un gain de pluie heureuse
quand ça vient mais ça ne vient pas toujours alors on deviendra artiste  
autrement dit chat indocile faussement désinvolte
et pourtant rien n’arrêtera le rythme de la langue
qui prend soleil et allure de cristal sec

 

Rien même pas l’élégance d’une couture nuageuse
ou l’insolite d’une épluchure de patate dans une rue abandonnée
près de remparts à l’Italienne et que des enfants chialent
l’œil sale pour avoir trop ignoré l’azur dans ses mots
dans la géométrie des dimanches ça viendra plus tard le mauve

d’une échine cuite à point sur des serments du genre je te friserai toujours
de quoi enfanter

 

Mais j’étais déjà beaucoup plus étranger que ces compagnons
connaissant le secret des chevelures autrement dit l’absurde
magnifique de la mer
 

Toute une imagerie qui se joue du bout des doigts

ce n’est pas une virtuosité à la loupe

de celle qui viendra plus tard pavane d’organdi jadis pour la danse

mais qui casse le rythme des joueurs de guitare voire de mandoline

loin dit-on toujours chez les enfants tristes

hâbleurs forcément malheureux forcément abjects

quand au soir toujours le même prénom José

envahit la ruelle pour n’obéir pas

 

Ils sont là presque amazoniens

enfonçant un index dans leur cul pour respirer la mort

il ne faut pas les contredire sans rasoir de chez Giletta

je mâche une tige de bambou je ne dirai pas où je l’ai trouvée

c’est bien fait pour eux futurs travailleurs dans un arsenal vite dégoisé

à l’odeur de pastis aux rires de crécelle idiophonique

 

Va chercher le père il doit jouer aux cartes

tant qu’il ne met pas une jeunesse enceinte

va lui dire qu’il a des devoirs ne serait-ce que de remplir un broc

va, cours

 

Ce n’est que du bruit ce n’est qu’hérédité

pour ne pas dire temporalité grotesque

ô toi misère j’y viens

J’ai parlé d’une sœur je vois qu’elle enfle je n’y suis pour rien
je lui ai fait cadeau d’une cravache
mais tout ça ne fait pas d’une moitié de poème un mythe
je suis trop cher je ne fais pas partie des commandos
croque sel mais surtout promeneur dans les prunes

tombant à la renverse déjà quand la mer me traverse
avec des phrases du style : n’oublie pas les cocons
c’est une métaphore autrement dit la vie

 

Nuit laiteuse je ne fais souvent que découper quelques corps innocents
moi ou on ou l’ironie d’Agamemnon
quand toutes sortes de grelots annoncent des chagrins
et qu’il est question de tout perdre sur un coup de tête
mésange de la mort au tout petit baiser
je n’oublie pas les parfums ni le pouvoir des vaccins

 

Enfants tristes dans votre sommeil
rêveurs de racines dans une odeur de cuisson
j’aurais pu vous réclamer un chant
mais ce sera sans doute un aboiement qui ne doit rien aux matelots
vous irez bientôt chez le dentiste avec ses guêpes
on fera de vous des champions
avec médailles avec caricature

 

 

J’ai déjà perdu l’usage des nœuds
trop de sang coule il y a perte d’historique marin
surtout à genoux dans un idéal fait de petites prières inutiles
gallinacés dont je peuple mes jambes (combien en ai-je?)
j’ai toujours été fasciné par ces tricots des enfants tristes
qui masquent une disparition ça leur convient
et moi je plante un canif dans un cahier
chaque jour
et puis ce qu’on appelle ici des patins : obscénité de fleur sans tige
en plein café tout cela est inerte en dehors des foires

 

J’ai déjà perdu cet opéra de velours
désormais au gré des facteurs publics
il ne faut surtout pas faire de vagues

il ne faut pas introduire les repasseuses là où fermentent des cols
dans la bonne sueur qui peint le ciel
je pose un œuf dans le sang du jardin
je ne serai jamais sculpteur comme mon grand-père car je suis trop coudé
je choperai la peste au mieux dans un vacarme de violettes
très loin auprès d’êtres qui parlent une langue inconnue
avec des femmes graissées comme des grenouilles
vertueuses dans l’orgasme dont on ne peut faire le tour
j’ai déjà perdu plusieurs mains
j’ai confié ma vie à plusieurs dés à coudre
j’attends une autre tristesse : celle au fil du rasoir

 

 

 

Alain Simon ( décédé en avril 2011)  Tristes Garçons, la mer

parution prochaine chez les Hommes sans épaules avec préface de Cathy Garcia

A. Simon ami et plus proche collaborateur de Guy Chambelland du Pont de l'Epée

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